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« Barbe à papa » ou quand l’exposition fait œuvre

J’ai été cueillie dès l’entrée par le dialogue des œuvres avec l’architecture de l’ancien Entrepôt lainé de 1834 où se love désormais le CAPC de Bordeaux. Déjà, s’interroger sur nos rapports d’échelle. L’œuvre de Julien Ceccaldi, Door to Cockaigne, nous donne l’impression d’avoir rétréci. Comme lorsqu’enfant, je m’imaginais faire partie d’un monde miniature ; l’étrange personnage de Julien Ceccaldi m’observe avec son œil indulgent. Le fond sonore saisit aussi : camion de glace, voix déformées par un usage abusif du vocodeur… J’ai le sentiment d’avoir franchi le seuil d’un autre univers, bienveillant et onirique.


Ensuite, satisfaction intense à la vision des courbes qui échangent et se répondent dans les premières « zones » de l’exposition — parler de salles ne rendrait pas justice à cette scénographie décloisonnée. L’artiste suédoise Ghislaine Leung nous accueille avec sa sculpture gonflable, arcade ludique et enfantine narguant les vieilles pierres du CAPC. Plastique contre pierres. Pierres contre popcorn avec Alfredo Aceto et sa gargouille. Les lignes se répondent. J’avance avec délectation de cette maîtrise. L’accrochage bavarde et les œuvres se découvrent grâce à lui.

J’ai envie de me perdre, comme dans une fête foraine. J’ai envie de jouer, comme une gamine. Et je perds toutes mes certitudes historiennes, mes yeux sont neufs. Les bancs deviennent ces praticables qui invitent tantôt à s’asseoir et s’extraire ; tantôt de marcher dessus et prendre part à cette fête. Et à en croire les traces de petites semelles, je ne suis pas la seule à avoir eu cette pulsion. Comme dans un palais des glaces, chacune des œuvres renvoie un reflet changeant — elles ne me parlent pas toutes, mais certaines m’attrapent. À l’instar des microcosmes sucrés de Silas Inoue ou des gourmandises de verre de Thomas Liu Le Lann. « Barbe à papa » polymorphe et mouvante. « Barbe à papa » qui nous invite à vagabonder, sans but. Juste un univers où se perdre en suivant les rails de Jesse Darling. Ne pas y voir une chute brutale, non. Plutôt la possibilité, la liberté de deux issues.




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